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Terrenoire : “La sensibilité est une arme” 

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Terrenoire : “La sensibilité est une arme” 

Avec son deuxième album protégé.e, Terrenoire invite à un voyage à la fois introspectif et universel. En 14 morceaux, les frères Herrerias mêlent électronique et organique pour donner corps à des récits intimes et des échos sociétaux puissants. Une création sensible et ambitieuse qui redéfinit, une fois de plus, les contours de la pop française. Rencontre.  Par Victor Dusson.

Terrenoire crédit Bettina Pittaluga
crédit Bettina Pittaluga

Que représente ce projet pour vous ? 

Vaste question… On écrit sur les événements du monde et sur la manière dont on les ressent. Mais c’est surtout la quête de sens qui nous a guidés. Comme on le dit dans notre morceau pleurer devant la beauté, notre époque est complexe pour les humains, mais selon nous, il est nécessaire d’avoir comme arme la sensibilité. On doit continuer à faire des œuvres qui ont du sens. Et ce que l’on appelle “beauté”, c’est la musique, l’art ou même une simple conversation. Dans un monde un peu déboussolé, cet album essaie de donner du sens à nos existences, à la fois intimement, individuellement et collectivement. 

Terrenoire, pourquoi ce titre, protégé.e ? 

Protégé.e car il s’agit de nous protéger de ces inquiétudes qui traversent notre génération, mais pas dans le sens d’un bouclier. Protéger, c’est comme la peau d’un fruit qui laisse passer un peu de lumière tout en préservant la chair. Il faut protéger la vie, préserver ce qui est beau dans nos liens, dans ce monde. Et c’est la musique qui nous le permet. C’est pour cela qu’il y a ce titre éponyme au milieu. Tout d’un coup, il n’y a plus de questions. Seulement la musique qui nous protège. 

Vous ne concevez pas cet album comme un disque mais comme un territoire à explorer, pourquoi ? 

Un morceau de musique, c’est plus que des vibrations dans l’air. Souvent, on le met sur nos oreilles et on voyage. On traverse une émotion. Une musique, un peu comme le chant d’un oiseau ou la berceuse qu’on chante à un enfant, ce sont des territoires que l’on porte avec soi. Et nous, on a toujours porté le nom de notre groupe, celui de notre quartier. On essaie toujours de mélanger la géographie avec la musique pour ancrer les choses. L’émotion c’est un territoire, et la musique permet de nous faire voyager dedans. Nos morceaux sont des cartes qui nous aident à faire notre propre cheminement. 

L’un des thèmes de cet album, c’est la métamorphose. Qu’est-ce que cela représente pour vous ? 

L’une des problématiques de notre époque, c’est de rester figé dans ses idées. Cela dresse des murs entre les personnes. Pour y remédier, on doit se transformer, changer, se métamorphoser. Cela passe d’abord par l’écoute, que ce soit celle de l’autre ou de soi. Il faut que l’on comprenne l’autre. Et pour cela, il faut absolument défaire les postures et se mettre à penser ensemble, les uns avec les autres. Étonnamment, on est dans un monde qui va très vite (Paris, la grande ville, ndlr), mais je pense que tout le monde se fige parce que tout le monde a peur, un peu comme les animaux. Pour lutter contre cela, il faut être en mouvement, avoir la capacité d’embrasser en permanence la métamorphose et faire renaître en soi les forces d’amour et du changement. On a beaucoup d’espoir à ce niveau-là. 

Ce sont ces changements que vous espérez inspirer chez vos auditeurs avec cet album ? 

C’est difficile de savoir si les gens entendent des phrases. Mais il y a des phrases qui peuvent toucher et résonner. C’est ça qui est important. Si déjà l’émotion touche le cœur, c’est bien. Et parfois, il y a des phrases qui résonnent, qui aident les gens à suivre leur propre chemin. 

Un mot sur le visuel. Dans les clips déjà sortis (un chien sur le port, le fou dans la voiture, vivre sobrement), vous avez beaucoup travaillé les images 3D. Pourquoi ? 

On s’est beaucoup posé la question de l’intelligence artificielle, de toutes ces technologies pointues qui nous permettent d’imiter le réel. D’une certaine manière, on trouve cela intéressant, mais on a à cela un rapport ambivalent, parce qu’on est tout le temps en train de jouer avec la machine, que ce soit devant nos ordinateurs ou avec nos instruments. On est très aidés par elle. Néanmoins, on peut trouver un chemin vers la beauté à l’intérieur des machines, mais c’est l’âme humaine qui doit collaborer avec. La machine ne doit pas penser à notre place. Et ici, la 3D réalisée par Felower nous permet d’imaginer tout ce qu’on veut, sans limite. On peut créer des choses monumentales, se retrouver sur un lit au milieu de l’océan ou au volant d’un bolide dans les rues d’une Gotham/Terrenoire City. 

Parlons de Terrenoire. Comment cet ancrage influence-t-il encore votre vision artistique ? 

Récemment, on a terminé une résidence au musée de la Mine, qui nous a permis de plonger profondément dans la mémoire et la culture de notre ville. 600 ans d’exploitation minière, ce n’est pas rien. Saint-Étienne s’est bâti autour de ses mines, de ses puits. Plonger dans ce passé a été un moyen de se reconnecter avec nos racines, de se réancrer. On a parlé avec des mineurs de fond de 85 ans, échangé avec leurs enfants, leurs petits-enfants, et même leurs arrière-petits-enfants. Et puis on a tendu notre micro pour enregistrer des voix et créer. On a écrit un long poème sur les acacias qui poussent sur les crassiers et qui seraient l’âme des mineurs. Peut-être qu’un jour on éditera ce texte, cette musique, ce poème, car notre métier, c’est aussi de raconter l’époque, de transmettre la mémoire. 

Ce partage de mémoire, vous allez l’expérimenter dans votre tournée ? 

Oui, on va régionaliser notre tournée, et chaque fois, on fera des rencontres artistiques en plus des concerts. On veut rester plusieurs jours sur un territoire, rencontrer les gens, prendre le temps de poser des gestes : travailler avec des chorales, des anciens, organiser des ateliers d’écriture, comme on l’a fait au musée de la Mine. Nous avons vraiment envie d’écouter les gens, savoir où ils vivent, que ce soit à Brest, à Nancy, dans le sud, partout. On souhaiterait éviter les processus trop industriels, comme une exploitation extractiviste de nos corps. Être projetés sur un territoire, jouer, repartir, sans réfléchir. Ce qui importe désormais, c’est de trouver le sens dans tout ce qu’on fabrique. Comme le dit François Cheng, le sens, c’est à la fois la signification, la sensibilité et la direction. On se retrouve dans cette définition. 

Toutes les informations sur la tournée ici ! 

 

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